À la suite du « Beauvau de la Sécurité », le gouvernement vient de relancer le projet de création de Directions Départementales de la Police Nationale (DDPN) regroupant la sécurité publique, le renseignement territorial, la police aux frontières et la police judiciaire, sous l’égide des préfets. Cette réforme prévoit une remise en cause inacceptable du principe de séparation des pouvoirs mais également une mutualisation des moyens pour ces missions publiques, qui rimera avec dégradation des conditions de travail des personnels de police et des conditions d’accueil des victimes.
En effet, les services de police judiciaire se sont développés en essaimant sur le territoire de nouvelles unités capables de juguler au mieux les évolutions criminelles mafieuses.
C’est ainsi qu’une partie de la police s’est spécialisée dans des domaines tels que la lutte contre les stupéfiants, les crimes, les atteintes à la personne, la délinquance astucieuse ou financière, le terrorisme, etc…
Des magistrat∙es ont de tous temps animé des parquets spécialisés, propres à chaque type d’infraction. Les magistrat∙es qui rappelons-le, évaluent la capacité des enquêteur∙rices, ont toujours dirigé ces dernier∙es dans leurs investigations, les mettant ainsi à l’abri de tentations ou déviances.
Le législateur a toujours pris soin d’écarter l’action judiciaire des influences politiciennes et autres, parfois promptes à minimiser certains faits pour en éclairer d’autres. Cette séparation des pouvoirs est apparue dans le but unique de garantir à toutes et tous la même justice
quelque-soit sa qualité ou son rang dans la société.
Ainsi, nous avons connu des cours en capacité de juger des chefs d’états de toute nationalité, de puissants financiers, ou des magistrat∙es défaillant∙es. II s’agit là du principe d’égalité propre à la République, à son socle historique.
Cependant, ce principe Républicain pourrait rapidement vaciller. Le projet de réforme du Président MACRON et de son Ministre de l’Intérieur, Gérald DARMANIN, consiste à l’écartèlement de la police judiciaire, en mettant fin à l’existence des brigades spécialisées et
indépendantes, en les plaçant sous l’égide du Préfet. Pour la CGT, c’est inacceptable!
La CGT n’a cessé de dénoncer la mise aux enchères de l’action des polices dans le but d’incliner ses actions dans le sens qui ne convient qu’à ceux qui la dirigent.
Cependant, aucun gouvernement n’était allé aussi loin.
La justice fière de son indépendance n’avait jusqu’à présent plié le genou sous la pression. Pour cela, elle disposait de l’expertise des grandes brigades qui investiguaient librement sur l’ensemble du territoire sous l’autorité d’un Parquet ou d’un∙e magistrat∙e instructeur∙rice légitimement saisi.
La réforme annoncée, videra de sa substance cette police judiciaire en plaçant ses enquêteur∙trices dans le creuset de la sécurité publique, elle-même chargée d’une grande part du renseignement et du maintien de l’ordre.
Elle prévoit de rattacher la quasi-totalité des effectifs de Police Judicaire aux commissariats qui sont eux-mêmes placés sous la corolle du Préfet, haut fonctionnaire en lien étroit avec l’exécutif.
La police de proximité doit être maintenue et développée, chaque citoyen∙ne est en droit de déposer plainte au plus près de son domicile ou du lieu de l’agression.
Pour cela, ces services doivent effectivement être renforcés. Ces derniers reçoivent la quasi totalité des plaintes déposées dans l’hexagone, il s’agit d’un volume d’investigations qu’ils ne peuvent pas traiter sans l’appui des brigades spécialisées.
Ce projet de réforme vient aussi masquer la réalité du manque de personnels de police nationale.
Rappelons que les volumes d’emplois sont en constant recul et que les candidat∙es à l’examen d’Officier de Police Judiciaire ne sont pas légion par manque d’attractivité de cette spécialisation.
L’explosion de certaines infractions, la spécialisation toujours plus insidieuse de la criminalité ne peut être jugulée que par la spécialisation des services et de ses enquêteur∙rices.
L’éparpillement des spécialistes ne conduira pas à l’augmentation de l’efficacité, bien au contraire.
La CGT n’acceptera pas cette manœuvre de destruction d’un fleuron de la police nationale que constitue la Direction Centrale de Police Judiciaire et revendique l’organisation d’états généraux de la Police Judiciaire.
La CGT exige une véritable séparation des pouvoirs et des moyens pour les missions publiques de protection de la population.
Montreuil, le 3 octobre 202