Saisi de longue date par la CGT, première organisation syndicale de la Fonction publique, le Comité européen des droits sociaux (CEDS) a rendu le 14 février une décision relative à la règle du trentième indivisible selon laquelle un agent de l’État en grève, même une heure, se voit retirer une journée entière.
Le CEDS considère que l’Etat français applique des retenues “disproportionnées” sur le salaire de ses agents grévistes. Il a aussi pointé l’absence de “justification objective et raisonnable” à la différence de traitement entre les agents de l’État et ceux des versants territorial et hospitalier, pour lesquels, comme dans le secteur privé, la retenue salariale est strictement proportionnelle à la durée de la grève.
Il s’agit incontestablement d’une belle victoire de la CGT dans cette période de mobilisation sociale.
Alors que cette décision aurait au minimum dû conduire le gouvernement à ouvrir une réflexion et un dialogue avec les organisations syndicales, le ministre Guerini a d’ores et déjà fait savoir par voie de presse que le gouvernement n’entend pas prendre en compte la décision du CEDS.
Pourtant prompt à affirmer son attachement au cadre européen, le gouvernement s’assoit donc sans vergogne sur une décision d’un organe du Conseil de l’Europe, organisation intergouvernementale chargée de la promotion des droits humains et qui regroupe 46 Etats membres dont la France.
Habituellement prompt à motiver sa politique de reculs sociaux par l’environnement international, le gouvernement n’hésite pas, lorsqu’il s’agit d’entraver le droit de grève, à brandir une spécificité nationale qui n’aurait selon lui rien d’anticonstitutionnel.
Le ministre pousse le cynisme jusqu’à affirmer que la règle du 1/30ème serait « plutôt avantageuse » puisque les retenues sont calculées sur les jours calendaires et non sur ceux ouvrés. Il omet évidemment au passage de préciser que ce mode de calcul est particulièrement pénalisant en cas de grève sur plusieurs jours incluant un week-end. Après les contre-vérités débitées s’agissant du projet de réforme des retraites, cette appréciation ministérielle confirme combien ce gouvernement a un problème avec les faits.
Cette prise de position du ministre est évidemment liée au contexte social. Elle n’entravera pas la volonté des personnels de la Fonction publique de gagner le retrait du projet Macron de retraite à 64 ans et pour cela de se mettre massivement en grève et de mettre à l’arrêt la Fonction publique à compter du 7 mars.
La CGT poursuivra sa bataille pour la suppression de la mesure discriminatoire que constitue le 1/30ème indivisible, comme de toutes les autres restrictions au droit constitutionnel de grève dans les trois versants de la Fonction publique, notamment celles introduites par la loi Dussopt dite de transformation de la Fonction publique.
Montreuil, le 6 mars 2023
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